Colori, La programmation au bout des (petits) doigts (épisode #9)

N’élevons pas nos enfants pour le monde d’aujourd’hui. Ce monde n’existera plus lorsqu’ils seront grands. Alors, apprenons-leur à s’adapter. 

Maria Montessori

Qu’il est difficile pour un éducateur de s’extraire de sa propre expérience pour se projeter dans les futurs possibles que rencontreront ses élèves ! Qu’il est compliqué de réaliser que leur réalité ne sera jamais la nôtre… Même si beaucoup d’entre nous n’ont pas grandi dans la culture numérique, elle est aujourd’hui omniprésente, modelant tous les aspects de notre vie et de notre société. Il est donc indispensable de donner les clefs de compréhension et d’utilisation de ces nouveaux outils à nos enfants. Mais comment ? Et par quoi commencer ? Amélia Mattar, fondatrice des ateliers COLORI, a très généreusement accepté de répondre à mes questions sur le sujet et ouvert des pistes de réflexion passionnantes. Pour nous écouter, c’est ici :

De quoi avons-nous parlé?

J’ai commencé par demander à Amélia quelques définitions, pour savoir de quoi nous parlions!

Le traitement de l’information par les machines est une aspiration ancienne de l’humanité ; l’avènement de l’informatique représente l’automatisation et l’accélération de ce traitement. 

Un algorithme est une suite d’instructions visant à accomplir une tâche ou à résoudre un problème. Dès qu’on accomplit une série d’action pour accomplir quelque chose on est dans une pensée algorithmique (une recette de cuisine est un algorithme par exemple).  

Un langage informatique est une façon de s’adresser à la machine pour qu’elle exécute ses algorithmes que nous avons imaginés. Il existe de très nombreux langages informatiques différents.

Pourquoi enseigner l’informatique aux très jeunes enfants?

La façon dont nos enfants comprendront et utiliseront les nouvelles technologies sera cruciale, tant pour eux que pour la société qui les accueillera et qu’ils construiront. Il est donc essentiel de les familiariser bien et rapidement aux arcanes de l’informatique et du monde digital, pour qu’ils en soient acteurs plutôt que consommateurs passifs. Mais comment faire pour enseigner les nouvelles technologies aux plus petits, en tirant profit de leur formidable plasticité neuronale mais sans les exposer trop tôt et trop souvent aux écrans ? Comment faire aussi pour que ces connaissances et cette posture soient accessibles au plus grand nombre, évitant ainsi une profonde fracture numérique entre ceux qui maîtriseront le monde digital et ceux qui le subiront ?

Forte de dix ans d’expérience dans le digital, Amélia Mattar a décidé de répondre à ces défis et ces questionnements en créant COLORI, ateliers d’initiation au code et à l’informatique sans écran pour les enfants de 3 à 6 ans. En septembre 2017 elle lance son premier atelier à Paris, qui connaît immédiatement le succès. 

COLORI propose aux enfants d’acquérir une culture informatique précise : usages, fonctionnement, composants, vocabulaire sont aussi importants que la programmation pour comprendre le monde digital.

Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement. 

Nicolas Boileau-Despréaux

Il s’agit aussi de comprendre que l’informatique n’est pas de la magie, et qu’on peut en être acteur ! 

Apprendre l’informatique avec Montessori

Le format des ateliers COLORI s’inspire fortement de la pédagogie Montessori – Amélia est d’ailleurs assistante Montessori diplômée par l’AMI et travaille avec une équipe d’éducateurs Montessori. La posture bienveillante de l’adulte est cruciale ; on n’attend pas de résultats de la part de l’enfant, qui doit avant tout s’amuser et passer un bon moment. 

Le matériel est esthétique, sensoriel et l’activité laissée au libre choix de l’enfant. L’autonomie de l’enfant est encouragée et favorisée.

Colori: informatique Montessori - Cubetto
Crédit photo Primotoys

Amélia et son équipe ont développé toute une série d’activités (le catalogue complet est disponible ici):

  • Cubetto : développé par la start up Primotoys , Cubetto est un robot que l’enfant programme grâce à des jetons de couleurs pour qu’il se déplace sur un tapis quadrillé. 
  • Dissection (!): une fois que les enfants ont bien manipulé Cubetto… on l’ouvre, pour en découvrir les différents composants. Selon le psychiatre Serge Tisseron, il est important d’ouvrir les robots avec les enfants car ils ont une tendance à l’anthropomorphisme qui les pousse à projeter de l’affection sur les machines. Il faut que l’enfant comprenne qu’une machine, aussi sophistiquée soit-elle, reste une machine.
  • Découverte du système binaire en réalisant des dessins de plus en plus complexes
  • Images classifiées (pour présenter un thème à l’enfant algorithmes de la vie quotidienne, les robots, les écrans…)
  • Cartes de nomenclature de l’ordinateur, interne et externe.
  • Lecture du conte Hayo le Robot écrit par Amélia, très ancré dans la réalité. Au cours d’aventures autour de l’informatique, des concepts sont introduits : algorithmique, système binaire, logique booléenne, robotique, intelligence artificielle. 
  • Activités « Learning Beautiful » développées par Kimberley Smith au terme de 3 ans de recherche au MIT sur la façon de présenter l’informatique aux enfants à la mode Montessori.
Colori: informatique Montessori - système binaire
Crédit photo COLORI

Et après 6 ans?

A la fin du cycle d’ateliers, les enfants acquièrent une compréhension globale du sujet. Ils sont capables de faire des petits algorithmes, de réaliser des dessins en binaire assez complexes, et maîtrisent un vocabulaire riche et précis sur le sujet. Ils moins enclins à consommer passivement la technologie.

A partir de 7-8 ans, on peut commencer à leur proposer de programmer sur écran (avec par exemple le logiciel Scratch) pour mettre en application concrète ce qu’ils auront manipulé durant les ateliers. COLORI travaille aussi avec Magic Makers pour proposer des introductions déconnectées aux ateliers des plus grands.

Réseau Colori de formateurs 

Le numérique est une nouvelle source d’inégalités très fortes, et il existe un clivage de plus en plus marqué entre ceux qui maîtrisent le sujet et ceux qui le consomment aveuglément et passivement. Pour Amélia il est important de proposer ces ateliers au plus grand nombre d’enfants possibles, et cela passe par la formation de formateurs et la mise en place d’un réseau. COLORI travaille déjà avec de nombreuses communes pour former les enseignants, les animateurs de centres de loisirs, et la méthode commence à être utilisée dans les classes. 

Quelques ressources pour aller plus loin 

Pour les enfants 

En juin 2019, un coffret d’activités COLORI sera proposé en librairies. Il comportera des activités et le premier épisode du conte Hayo le Petit Robot.

Hello Ruby (Linda Liukas), les aventures très imaginaires d’une petite fille dans le monde informatique. Propose à la fin des activités à mettre en place par les parents ou les enseignants.

Pour les adultes, parents, enseignants 

1, 2, 3, Codez (Claire Calmet, Mathieu Hirtzig, David Wilgenbus) : pour entrer dans les rudiments de la programmation à l’école

Le site code.org : site américain (mais disponible en français!) pour les enseignants souhaitant proposer des cours de programmation aux enfants. Activités à télécharger, dès 3 ans, avec vidéos explicatives pour les mettre en place.

Les ouvrages de Yuval Noah Harari

Coori: informatique Montessori - logo

Amélia est la fondatrice de Colori, les ateliers d’initiation au code et à l’informatique sans écran pour les enfants de 3 à 6 ans. Vous pouvez suivre les aventures d’Amélia et son équipe sur le site Internet de COLORI, son profil Facebook, sa page Instagram et même son compte Twitter. Mais le mieux pour les parisiens consiste encore à leur rendre visite dans leurs locaux du 20èmearrondissement à Paris !

Quant à nous, nous nous retrouvons la semaine prochaine pour de nouvelles aventures éducatives ! A bientôt 🙂

(crédit photo de couverture Tech Age Kids)

1 réflexion sur “Colori, La programmation au bout des (petits) doigts (épisode #9)”

  1. Code, oui, mais verbe aussi, de préférence avec un humain, entre 18 et 24 mois. Priorité des priorités.
    https://sites.google.com/musuro.com/fondationmusuro/m?authuser=0#h.p_Y5B7KPHLEJju

    Ps) je parle désormais d’entreprises Montessori pour celles qui ont inversé la problématique pour les différents cognitifs. Plutôt qu’ils s’adaptent au monde des neurotypiques, c’est à ces derniers de le faire et d’apporter les assistances humaines et techniques nécessaires!

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